MY OWN WONDERLAND

If I had a world of my own, everything would be nonsense. Nothing would be what it is, because everything would be what it isn't. And contrary wise, what is, it wouldn't be. And what it wouldn't be, it would. You see?

Thursday, February 18, 2010

Le Serpent qui danse

Le Serpent qui danse
Que j'aime voir, chère indolente,

De ton corps si beau,

Comme une étoffe vacillante,

Miroiter la peau!



Sur ta chevelure profonde

Aux âcres parfums,

Mer odorante et vagabonde

Aux flots bleus et bruns,



Comme un navire qui s'éveille

Au vent du matin,

Mon âme rêveuse appareille

Pour un ciel lointain.



Tes yeux, où rien ne se révèle

De doux ni d'amer,

Sont deux bijoux froids où se mêle

L'or avec le fer.



A te voir marcher en cadence,

Belle d'abandon,

On dirait un serpent qui danse

Au bout d'un bâton.



Sous le fardeau de ta paresse

Ta tête d'enfant

Se balance avec la mollesse

D'un jeune éléphant,



Et ton corps se penche et s'allonge

Comme un fin vaisseau

Qui roule bord sur bord et plonge

Ses vergues dans l'eau.



Comme un flot grossi par la fonte

Des glaciers grondants,

Quand l'eau de ta bouche remonte

Au bord de tes dents,



Je crois boire un vin de Bohême,

Amer et vainqueur,

Un ciel liquide qui parsème

D'étoiles mon coeur!



Baudelaire

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